Fiche-lecture - Micropolitiques des groupes – David Vercauteren
Micropolitiques des groupes
Pour une écologie des pratiques collectives
David Vercauteren
Les prairies ordinaires, 2ème éd., 2011, 246 pages.
Cette fiche de lecture a été rédigée dans le cadre de la recherche-action que je mène actuellement, les propos de la section « commentaires personnels » sont, au départ, destinés à mes collègues de promotion. Néanmoins, je pense que cette fiche de lecture peut s’adresser au plus grand nombre pour une première découverte du contenu du livre.
L’auteur
David Vercauteren vit à Bruxelles. Son parcours militant l’a mené
des Verts pour une Gauche Alternative (VeGA) au Collectif Sans Nom,
puis au Collectif Sans Ticket. [Présentation 4ème de couverture]
Micropolitiques des groupes est à l’heure actuelle le seul ouvrage de
David Vercauteren.
Ont contribué à cet ouvrage Thierry Müller et Olivier Crabbé.
Le livre
Ce livre est l’aboutissement d’un « pas de côté » engagé par les
membres du Collectif Sans Ticket à sa dissolution en 2003. Le
collectif s’était donné comme dernière exigence : « Ne nous quittons
pas sans laisser une pierre sur le bord de la route ». Cela a abouti à
un texte d’une cinquantaine de pages destiné au membre du CST. C’est à
partir de ce travail que David Vercauteren, accompagné par Thierry
Müller et Olivier Crabbé, a écrit cet ouvrage.
Ce livre n’a pas pour vocation a être lu d’une traite du début à la
fin. Il a été pensé et articulé autour de chapitres correspondant à
différentes constituantes du fonctionnement d’un collectif : rôles,
réunion, artifices, pouvoir, scission, souci de soi, évaluer…
L’auteur propose donc deux manières d’aborder les chapitres en
fonction que l’on soit « un groupe qui se forme » ou un « groupe en
crise ».
A noter également que l’auteur a mis à disposition cet ouvrage en
consultation gratuite sur le site Internet consacré au livre : http://micropolitiques.collectifs.net/
Propos de l’ouvrage
Certains membres du Collectif Sans Ticket se sont posés la question
de la trace qu’ils pourraient/devraient laisser de leur expérience
collective. David Vercauteren a souhaité, à travers cet ouvrage porter
ce questionnement auprès d’autres collectifs en parlant d’une «
culture des précédents ».
La première partie du livre introduit le contexte. Il présente
l’évolution et les collectifs par lesquels lui et quelques autres sont
passés. Il termine par l’expérience vécue au sein du Collectif Sans
Ticket et notamment le lot de questions qu’elle amène sur le
fonctionnement interne de ce genre de groupe. Vient alors une phase de
construction d’une réflexion au travers d’apports théoriques (Deleuze,
Guattari, Foucault, Nietzsche, Spinoza, Stengers…) et de diverses
rencontres et entretiens avec des personnes rencontrées au gré de
leurs avancées et partageant les mêmes questionnements.
A travers ses expériences vécues au sein de collectifs, David
Vercauteren pose par écrit deux sujets qui lui semblent importants :
le temps du « pas de côté » vis-à-vis de ces pratiques nécessaires au
collectif et la transmission de ces savoirs expérientiels.
A travers l’expression « culture des précédents », l’auteur aborde
tout d’abord cette démarche de conscientisation de son fonctionnement
interne. Il voit cela comme des temps nécessaires, des temps de prise
de recul vis-à-vis de ses pratiques collectives. Ces savoirs acquis
par les collectifs sont autant de manière de faire « micropolitique ».
C’est également à une autre échelle qu’il entend cette démarche de
cultiver ses précédents. Ces expériences vécues par tout ces
collectifs sont autant de savoir qu’il serait important de se
transmettre. Non pas dans le but d’uniformiser les fonctionnements de
collectifs mais bien d’avoir conscience et connaissance des
expériences vécues par d’autres. Il s’agirait donc de s’appuyer sur
deux types de savoirs, ceux déjà rencontrés en interne et ceux des
collectifs qui nous ont précédé.
David Vercauteren a ainsi découpé son livre en autant de chapitres que
de pratiques collectives qu’il lui a semblé pertinent de questionner.
Pour chacun d’eux, il nous propose sa manière d’appréhender le sujet
et la façon qu’ils ont eu de l’appréhender (ou non) dans les
collectifs dont il a fait parti.
Commentaires personnels
Ce livre joue un rôle important dans mes questionnements et mes
travaux de recherche. En dehors du fait qu’il fut l’un des premiers
que j’ai lu à ce sujet, il a, pour moi, mis des mots et des
définitions sur des questions que je me posais au sein des collectifs
que je fréquentais.
Je trouve que le sous-titre est très bien choisi (Pour une écologie
des pratiques collectives) car nous sommes bien ici sur des
questionnements d’ordre « micro », prendre le temps d’observer et de
questionner les interactions qui se font entre les êtres vivants et
leur milieu.
Sûrement du fait qu’il est écrit de la main de quelqu’un qui pratique
– ou a pratiqué – je trouve que ce livre est assez facile d’accès et
que rapidement les idées exposées par David Vercauteren nous
parlent.
C’est un livre qui circule déjà bien dans les réseaux que je fréquente
et que je conseille autour de moi. Il est notamment intéressant comme
porte d’entrée vers tous ces questionnements au sein d’un
collectif.
Mots et expressions
Groupe (collectif) :
Un groupe est un système écologique expérimentant et sélectionnant dans une infinité de rapports (géographique, sexuel, organisationnel, linguistique…) ceux qui lui conviennent à un moment donné.
La talvère :
Le « pas de côté » constitue une sorte de talvère. En Occitan, la talvère désigne cet endroit non labouré en bordure de champ qui permet au cheval et à son charroi de manœuvrer pour entamer une nouvelle ligne, occasion pour le paysan de se reposer et de jeter un œil sur le travail accompli. Espace et moment de non-production sans lequel, sauf à faire le tour de la terre, le labourage du champ, sa fertilisation, n’est pas possible.
Hupomnêmata :
Terme grec qui désigne un aide-mémoire. Chez les grecs anciens, les stoïciens des I et IIe siècles, l’hupomnêmata est une sorte de cahier dans lequel on note les savoirs qui comptent pour soi et qui peuvent aider d’autres. Sa fonction est de cultiver les savoirs glanés au fil de l’expérience, dans ce que l’on a entendu ou lu, en vue de les avoir « sous la main » quand on est confronté à un évènement. Michel Foucault, l’Herméneutique du sujet ; infra, dans l’annexe : Petit lexique.
Compléments
Le site Internet consacré au livre http://micropolitiques.collectifs.net/
est très bien fourni pour, soit compléter sa lecture, soit piocher
dedans sans l’avoir forcément lu. A voir notamment :
– Note
de lecture par Pascal Nicolas-Le Strat
– L’écologie
des collectifs
– Artifices
anti-hiéarchiques à l’usage des groupes
– Les Rôles
évoqués dans le livre et repris à Starhawk dans Femme, magie et
politique.